Caudéran est à Bordeaux ce que la Bretagne est à la France, l'anse à la cruche, l'appendice au gros intestin : une jolie bosse. Le quartier n'a été annexé par Bordeaux qu'en 1965, et demeure à part. On aura beau faire, semble-t-il, tricoter de nouvelles lignes d'autobus et pommader cette cicatrice âgée d'un demi-siècle : l'ancien village cultivera toujours sa différence.
Telle était du moins l'idée que j'examinais en tournant la cuillère dans mon café, ce matin d'octobre, face à l'église Saint-Amand.
C'était dimanche, et la messe battait son plein. Des familles entières, de l'aïeul au nourrisson, franchissaient le porche d'un pas gaillard. À l'intérieur, une vraie cohue. Voilà bien longtemps que je n'avais pas vu une nef catholique affichant complet.
Mon étonnement fit sourire celui qui m'avait servi le café, en réalité un caviste, et son ami Damien, un designer habitué des lieux. Deux Caudéranais d'adoption, qui m'initièrent doucement à leur quartier.