À Bordeaux, l’eau rationnalisée pour arroser les espaces verts

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Photo des visiteurs se baladent dans le jardin de la Mairie sous une végétation en pleine éclosion.
Le jardin de la Mairie en avril 2025 © Direction de la communication / Ville de Bordeaux

Alors que la transition climatique impose une révision profonde de notre rapport à l’eau, la Ville de Bordeaux prend les devants. En misant sur une gestion raisonnée des espaces verts, elle réduit drastiquement sa consommation d’eau tout en repensant l’entretien urbain. Rencontre avec Cédric Berger, chargé de mission écologie pour la ville.

Depuis plus de deux décennies, les signaux d’alerte sur le climat se multiplient. À Bordeaux, cette prise de conscience s’est traduite très concrètement dans la façon d’entretenir les parcs et jardins de la ville. La consommation d’eau pour l’arrosage est passée de 800 000 m³ en 2005 à moins de 160 000 m³ attendus en 2025. « Il fallait anticiper pour préserver la ressource en eau. Cela fait 25 ans qu’on le sait. Aujourd’hui, on agit », affirme Cédric Berger, qui coordonne les politiques d’écologie urbaine pour la Ville.

Un nouveau modèle de gestion à plusieurs échelles  

Ce virage écologique repose sur deux grandes missions que porte Cédric Berger : la labellisation ÉcoJardin, qui vise à harmoniser les pratiques dans les espaces verts, et la gestion opérationnelle des parcs et jardins. Cette double approche permet à la fois de mettre en œuvre des actions concrètes et de structurer une vision à long terme. Elle s’incarne dans une stratégie de priorisation des espaces selon leur usage, une véritable « doctrine de gestion raisonnée » mise en œuvre dans tous les nouveaux projets d’aménagement.  

 La Ville applique une stratégie de hiérarchisation des espaces :  

  • Zone horticole : plus horticole, elle conserve un entretien plus soutenu pour maintenir l’image de la ville. 
  • Zone récréative : très fréquentée aires de jeux et de pique-nique, avec un entretien intermédiaire. 
  • Zone biodiversité : la nature y est laissée libre, avec peu ou pas de tontes.  

 Cette gestion différenciée permet de réduire la pression sur la ressource en eau tout en favorisant la vie écologique.   

Cette approche s’inscrit dans le cadre du label ÉcoJardin, créé en 2012 par Plante & Cité. Ce label national reconnaît les pratiques de gestion écologique des espaces verts, en évaluant des critères tels que la biodiversité, la gestion de l'eau, des sols, des déchets, et l'implication du public. Il vise à promouvoir une gestion durable des espaces verts, à sensibiliser les usagers et à valoriser le travail des gestionnaires engagés dans une démarche écologique.

Alternatives et Technologies aux services de l'eau

Réduire l’utilisation d’eau potable pour l’arrosage est devenu un objectif majeur. Aujourd’hui, Bordeaux puise déjà dans diverses sources alternatives: l’eau de pluie, le pompage dans la Garonne, les forages souterrains, voire la réutilisation d’eau de piscine. Et les projets ne manquent pas. La ville étudie actuellement l’utilisation de l’eau de circuit de refroidissement inutilisée de la Cité municipale pour arroser les jardins sur les terrasses de Mériadeck. Elle prévoit également de remettre en service le système de pompage du lac de Bordeaux afin d’utiliser cette réserve, principalement composée d’eau de pluie, pour irriguer les jardins voisins.  

Dans le même temps, des outils technologiques permettent de piloter les arrosages avec une précision inédite. Des sondes mesurent en continu l’humidité des sols pour ajuster les apports en eau. Ce système, en place depuis 2021, a permis d’économiser entre 30 et 40 % d’eau sur les sites équipés. Le Jardin des Barrières et celui de la Mairie figurent parmi les derniers à bénéficier de cette innovation.

30 à 40 % 

C'est le pourcentage d’eau économisée sur les sites équipés de ce système depuis 2021.

Un entretien au plus près du vivant

La transformation passe aussi par une réflexion sur le vivant, jusque dans le choix des plantes. La Ville privilégie désormais des essences plus sobres en eau, adaptées aux sécheresses. Et pour préserver l’humidité des sols, elle pratique le paillage avec les déchets verts issus des espaces eux-mêmes en gestion in-situ. « Tout ce qui est dans le jardin reste dans le jardin », résume Cédric Berger, en parfaite cohérence avec le label ÉcoJardin. 

La lutte contre les pertes d’eau passe aussi par un travail de fond sur les infrastructures. Plusieurs réseaux anciens ont été réparés, notamment là où des mélanges accidentels entre eau potable et eau de forage pouvaient se produire. La chasse aux fuites est devenue une routine quotidienne.

Un arrosage 100% non potable à l'avenir ?

Avec déjà plus de 50 % de l’arrosage assuré par des ressources alternatives, la Ville voit plus loin. Bordeaux peut-elle un jour assurer l’arrosage de ses espaces verts exclusivement sans eau potable ? « Oui, j’y crois ! », affirme Cédric Berger. « C’est déjà le cas pour le Parc Bordelais, le Jardin Public… et ce n’est que le début. »  

La ville affirme ainsi une ambition claire : conjuguer sobriété, qualité de vie urbaine et résilience écologique. Dans un contexte où chaque goutte compte, Bordeaux devient un modèle à suivre. La ville affirme ainsi une ambition claire : conjuguer sobriété, qualité de vie urbaine et résilience écologique. Dans un contexte où chaque goutte compte, Bordeaux devient un modèle à suivre.