Projet urbain Bordeaux et son projet urbain : des territoires entre renouvellement et conquête
Mis à jour le 7 mai 2025

Série "Bordeaux et son projet urbain aujourd'hui et demain" (Épisode 3) - Le projet urbain bordelais tient compte de l’héritage des aménagements et des constructions déjà engagées, mais il réoriente ses grandes opérations urbaines. Exemples avec des projets sur des friches industrielles et urbaines, les grands ensembles, le centre-ville et le secteurs artificialisés à reconquérir.
La reconquête des friches industrielles et urbaines
Le projet urbain bordelais tient compte de l’héritage des aménagements et des constructions déjà engagées, mais il réoriente ses grandes opérations urbaines. La reconquête des friches industrielles, portuaires, ferroviaires et militaires situées autour des quartiers du centre ancien permet de réurbaniser des sites déjà artificialisés et de les intégrer à la ville existante. Par leur transformation progressive en de nouveaux quartiers, ceux-ci peuvent permettre de répondre à une grande partie des besoins en logements et activités de ces prochaines années.
Certains de ces projets d’aménagement (comme Ginko ou les Bassins à flot) s’achèvent en 2025 et les autres (Brazza, Niel, et les zones d’aménagement concerté Saint-Jean-Belcier et Garonne-Eiffel dans l’opération d’intérêt national Bordeaux Euratlantique) sont à des stades avancés de leur mise en oeuvre. Pour la plupart, ils seront en grande partie achevés entre 2030 et 2035 avec des réorientations fortes des espaces publics aménagés et des programmes de construction.
Sur ce dernier axe, une offre supplémentaire de logements aidés est développée, en accession sociale à la propriété, pour atteindre par exemple 1 000 logements sur la ZAC Bastide-Niel et en locatif social, en particulier dans l’OIN Bordeaux Euratlantique. L’accent est mis sur la qualité des logements, avec un plan évolutif si possible, des espaces pensés pour répondre aux besoins des usagers, pour toute leur trajectoire résidentielle, des espaces extérieurs et communs, et des constructions bas carbone.
La reconquête des friches industrielles, portuaires, ferroviaires et militaires permet de réurbaniser des sites déjà artificialisés et de les intégrer à la ville existante.
Au sein de ces projets de nouveaux quartiers, Bordeaux et la Métropole, pilotent des opérations d’aménagement, mobilisent les habitants et acteurs économiques pour imaginer leur futur cadre de vie. À Brazza, des balades urbaines permettent aux nouveaux arrivants de découvrir les enjeux et la complexité du projet en cours ; ils sont également amenés à réfléchir à la conception des futurs espaces publics majeurs du quartier, tels que la place Andrée-Chedid. La même démarche est adoptée sur la zone d’aménagement concerté Bastide-Niel, avec la co-conception par exemple d’une place avec les habitants.
L’ensemble de ces mesures vise à renforcer l’appropriation des futurs quartiers par leurs usagers et l’émergence du lien social.
Le renouvellement des quartiers de grands ensembles
Dans les quartiers où sont engagés depuis plusieurs années des programmes de rénovation urbaine importants, le projet urbain prend le contre-pied de la culture de la démolition qui domine depuis 40 ans. Là où un discours stigmatisant associant formes urbaines et problèmes sociaux s’est longtemps développé, justifiant des démolitions toujours plus ambitieuses pour « banaliser » ces espaces urbains, le projet urbain bordelais opère un véritable changement de paradigme.
Bordeaux a engagé ces dernières années des réorientations fortes des projets de renouvellement de ces quartiers. Elle a arrêté les démolitions initialement prévues, pour permettre la conservation de logements très sociaux, dont la ville manque cruellement, et qui sont souvent de grands logements de qualité, difficiles à reconstituer aujourd’hui.
Ce principe fort incarne l'une des ambitions de la Ville pour renouveler, avec les bailleurs, la Métropole et l'Etat, l'urbanisme de ces quartiers.
Dans le quartier des Aubiers, au sein du programme de rénovation urbaine piloté par Bordeaux Métropole, la barre des « G » ne sera pas démolie. Séparée en plusieurs entités afin de poursuivre l’ouverture du quartier, dans le cadre des travaux qui seront engagés en 2026 par le bailleur Aquitanis, elle restera la mémoire du lieu à laquelle les habitants sont très attachés. Cette décision limitera, en outre, le gaspillage de ressources avec l’utilisation de matériaux déjà en place.
De la même manière, la réhabilitation des logements et la préservation des espaces ont été préférées à la démolition d’une partie d’une barre de logements sociaux dans le quartier du Grand Parc dont le projet est piloté par la Ville. Un projet de ferme urbaine se prépare à l’arrière du centre social, lui aussi sauvé de la démolition…
Dans le quartier de la Benauge, au sein du programme de rénovation urbaine intercommunal Joliot-Curie piloté par Bordeaux Métropole, alors que la Barre D a été démolie il y a quelques années, un projet dense et de même hauteur a été revu pour éviter de recréer une barrière artificielle au cœur du quartier. À la place, le même nombre de logements sera produit mais sur deux parcelles attenantes afin de proposer un projet plus qualitatif et mieux inséré dans le paysage du quartier.
Bordeaux et la Métropole soutiennent, avec les bailleurs sociaux, les grands programmes de réhabilitation qui visent à créer plus d’espace, à donner de la générosité aux logements, et à en améliorer les performances énergétiques. L’objectif est de renforcer les liens sociaux et l’identité des quartiers par un « urbanisme d’attentions », comme l’exprime l’architecte Jean-Philippe Vassal.
Le projet urbain accentue fortement la végétalisation prévue dans les quartiers de grands ensembles, pour apporter de la qualité, de la fraîcheur de la biodiversité, des lieux d'échanges et de rencontre, des possibilités de cultiver un bout de jardin...
C’est le cas dans le quartier du Grand Parc avec l’expérimentation du dispositif Territoire zéro chômeur de longue durée qui permet de réinsérer dans l’emploi des personnes durablement éloignées, en partant des compétences des personnes pour leur proposer des emplois utiles pour le quartier et contribuant au développement des liens sociaux ; dans le quartier des Aubiers, lorsque la Ville soutient l’installation d’une Maison France services pour garantir un accès aux services publics ayant déserté le quartier ; ou encore à la Benauge, quand par le biais d’un hackathon, la Ville a proposé aux habitantes et habitants de travailler collectivement à des solutions pour faciliter l’accès des jeunes à l’emploi.
Le centre et les boulevards
Le projet urbain améliore les continuités urbaines du centre-ville et leurs qualités à travers le réaménagement des allées de Tourny et de la place Stalingrad. En connectant de manière plus confortable la rue Sainte-Catherine à la rue Fondaudège, fortement requalifiée par le tramway, la requalification des allées de Tourny ambitionne de desserrer les usages, d’apporter des espaces de respiration et de pause, et de faire de cet espace central du patrimonial historique bordelais un nouveau lieu populaire, accueillant et gratuit. Ce projet se construit avec les habitants et les acteurs économiques dans une démarche d’urbanisme pragmatique.
La piétonnisation partielle de la place Stalingrad, de l’autre côté du Pont de pierre lui-même réservé aux piétons, vélos et transports en commun, vise également à apporter animation et usages de centre-ville vers la rive droite, en continuité avec les quais apaisés et végétalisés.
Le projet urbain bordelais poursuit par ailleurs la politique engagée depuis plus de 20 ans, visant à lutter contre l’habitat indigne, à diversifier l’offre de logement, en y intégrant une stratégie d’amélioration énergétique des bâtiments, d’adaptation du centre-ville au changement climatique et à l’atténuation de ses conséquences.
À partir d’une large concertation commencée en 2023, Bordeaux et sa métropole porteront à partir de 2027 un nouveau projet d’aménagement du centre ancien*. Sur 320 hectares, rive gauche, du quartier Saint-Pierre jusqu’au quartier Nansouty et aux alentours de la gare, il s’agira de varier l’offre de logements, de renforcer l’activité économique et d’améliorer la performance énergétique des bâtiments. On cherchera aussi à faciliter la vie quotidienne en implantant, notamment, dans les espaces communs, des services mutualisés comme des bicycletteries, des composteurs, des recycleries, de petits espaces extérieurs partagés ou des commerces de proximité.
Le projet d'aménagement du centre ancien aspire à le rendre plus accessible, inclusif et adapté aux différentes situations.
Déployées au cas par cas, les opérations immobilières ponctuelles remettront sur le marché des logements de qualité. Elles intégreront dès que possible des services utiles dans ces quartiers très contraints par l’étroitesse des rues et du bâti.
Le projet aspire enfin à rendre le centre-ville plus accessible, inclusif et adapté aux différentes situations, à voir se multiplier la pratique de la marche et du vélo, les activités économiques et/ou associatives, et le nombre de rues végétalisées, si précieuses pour rafraîchir la ville minérale.
Autour du centre ancien, les quartiers à dominante résidentielle, tels Caudéran, Saint-Augustin, Nansouty ou Bacalan, font l’objet de réflexions pour préserver et créer des espaces naturels, améliorer la mixité sociale et la qualité de l’offre de logement. Ces quartiers accueillent et accueilleront de nouveaux projets de construction, mais dans le respect de l’identité architecturale et paysagère qui s’est forgée au fil du temps et que le projet urbain bordelais entend préserver. Il est essentiel que les projets s’insèrent harmonieusement dans leur quartier et son tissu social, voire leur apportent un « plus », afin d’être bien accueillis par les habitants en place.
Ces secteurs présentent de formidables opportunités de faire émerger des logements de grande qualité, bien desservis par les transports en commun, comme préconisé dès 2012 par la démarche 50 000 logements autour des transports en commun » lancée par Bordeaux Métropole. Afin d’apporter à ces futurs logements le cadre de vie espéré par leurs habitants, le projet urbain bordelais anticipe dès maintenant les besoins de demain, en recherchant et en programmant les équipements et espaces publics nécessaires (parcs, offre petite enfance et enfance, activités sportives, loisirs, déchetteries…) mais aussi des sites potentiels d’implantation d’emplois de proximité.
Les secteurs artificialisés à reconquérir
Aux lisières de la ville constituée, des zones déjà artificialisées, comme le site du Parc des expositions, le centre commercial Bordeaux-Lac ou, dans une autre configuration, la friche ferroviaire Cracovie au sud du quartier des Aubiers, constituent a tant d’opportunités de reconquête urbaine regroupées dans une seule et même réflexion d’ensemble, conduite avec Bordeaux Métropole et la Ville de Bruges sur le thème de la porte métropolitaine du Lac. Marqué par la mono-activité, conçu pour l’usage automobile et très consommateur en terrain, ce secteur d’entrée de ville témoigne d’une époque de l’urbanisme révolue.
Par son projet urbain, la ville regagne du terrain sur elle-même : elle s'agrandit sans s'étendre, au nord et au sud, ainsi que le long du fleuve, sur sa rive droite.
C’est le cas notamment du centre commercial du Lac, dont le projet de requalification nécessitera de rationaliser les espaces commerciaux pour libérer de la place afin de réaliser des logements et des espaces publics et de mieux connecter ce secteur à la ville pour ne plus être exclusivement consommateur et devenir urbain au sein de cet espace. Dans ce projet, une quantité importante des 98% de surfaces artificialisées pourra être végétalisée et une vigilance particulière sera portée à la qualité des logements produits et à leur impact environnemental.
Le pont Jacques-Chaban-Delmas, trait d’union entre la rive droite des quartiers de Brazza et Niel et la rive gauche Sur la rive droite également, entre les projets Brazza et Bastide-Niel, les enjeux de désimperméabilisation et de connexion à la ville existante sont tout aussi majeurs.
Une fois ces transformations opérées, Bordeaux ne disposera plus de grands fonciers de ce type à requalifier. Pour poursuivre la production de logements, elle devra opérer dans la dentelle, organiser une densification intelligente dans certains secteurs aujourd’hui encore peu occupés. Les regards se porteront notamment autour des grands axes de transports en commun, qui se prêtent particulièrement à ce type de réflexion. Des fonciers, publics ou privés, aujourd’hui artificialisés mais sous-utilisés (parkings, délaissés…) pourront être également optimisés pour réaliser des opérations de logements d’une taille modeste, de manière à s’intégrer dans un tissu urbain déjà constitué.
Pour préparer l’avenir de ces différents sites, le projet urbain bordelais met en place des outils fonciers. Ils permettent, d’une part, d’encadrer l’évolution des prix, et d’autre part, de préempter, pour acquérir des fonciers stratégiques. La collectivité sera ainsi prête à intervenir à l’avenir pour apporter les équipements, espaces et services publics nécessaires à leur bon fonctionnement.